L’égo est un concept que l’on retrouve souvent dans notre société, et il est assez mal vu. En règle générale nous jugeons une personne comme ayant trop d’égo lorsqu’elle semble s’affirmer, qu’elle a confiance en elle, qu’elle semble se choisir en premier plutôt que de se laisser être manipulée, lorsqu’elle semble hautaine, critique…
L’égo a mauvaise presse, et on a tendance à se sentir mal à l’aise lorsqu’on est soi-même pointé du doigt comme ayant de l’égo.
Cette notion d’égo est largement reprise dans le développement personnel et notamment le new-age qui y voit une entrave au développement spirituel de la personne. Pourtant, en psychologie cette notion d’égo n’est pas du tout considérée de la même façon. Là où le new-age, le voit comme un ennemi, la psychologie le voit comme un ami. Cette différence est simplement une question de compréhension de l’humain, de sa construction personnelle, de son identité, de sa personnalité, de son soi.
Mieux comprendre la notion d’égo, de soi, en psychologie c’est s’apercevoir que la notion d’égo proclamée dans le new-age est source de bien des erreurs, et bien des dérives. Elle engendre beaucoup de mécanismes qui sont improductifs pour les personnes, voir dangereux selon les profils.
L’égo, selon le new-age
Pour le new-age, l’égo est une partie de nous-même qui s’est forgée tout au long de notre vie, de nos expériences et qui entrave le bon développement spirituel de la personne, empêche d’atteindre l’éveil, de développer des capacités extra sensorielles, d’atteindre sa véritable nature d’être divin.
Cet égo est constitué de nos conditionnements, de nos peurs, de nos blessures, qui se sont construits depuis notre naissance. On a donc un bagage qui empêche l’expansion de notre être.
Pour le new-age, nous ne sommes pas ce que nous pensons être. Notre identité, notre personnalité, qui se sont construites depuis l’enfance, ne constituent pas l’être véritable que nous sommes. Ces parties de nous sont donc un leurre. Ces constructions pour le new-age sont comme des masques qui nous empêchent d’accéder à l’être divin, à notre âme véritable, qui elle-même n’est accessible que lorsqu’on travaille sur son égo et tous ses composants.
La tâche de toute personne dans le new-âge est donc d’amoindrir cet égo. Quand bien même certains nuancent leurs propos concernant l’égo, pour beaucoup ce dernier est un aspect de soi à détruire à tout prix.
S’amorce alors une véritable enquête intérieure pour reconnaître quand cet égo apparaît pour mieux déjouer les pièges qu’il nous tendrait. Car pour le new-age l’égo est un farceur, il met en place de multiples stratagèmes pour nous empêcher de révéler notre divinité.
Parmi ces stratagèmes, on retrouve le mental, qui fait en sorte que l’on se pose trop de questions « est-ce la bonne solution? », « ceci est-il bon pour moi? », à chaque fois que l’on émet un doute, le new-âge renvoie cela à la notion d’égo, qui instigue un schéma de peur et de doute. Parmi ces questions de l’ordre du doute, qui sont émises par le mental et donc de l’égo, il y a celles qui sont de l’ordre de la réflexion qui sont également mises dans le panier mental/ego. Une personne éveillée n’a pas a se poser de questions sur le fonctionnement du new-âge, comment les énergies fonctionnent-elles? Qu’en dit la science? Par exemple … puisque l’être éveillé doit avoir les réponses en lui même, il les reçoit de l’univers, de ses guides spirituels. Chercher les réponses dans le monde « normal », chez les scientifiques par exemple, c’est chercher les réponses chez des personnes qui seraient encore endormies, donc encore emprises de leur égo. Les sources ne seraient donc pas sûres, car non connectées au plan divin, au cœur, à l’amour inconditionnel.
La notion d’égo est donc très liée au monde dans lequel on vit, métro, boulot, dodo, consommer etc… ce mode de vie est vu par le new-âge comme entravant, lui aussi, notre expansion. Tout comportement en lien avec le mode de vie actuel est vu être sous la coupe de l’égo. Vouloir retrouver un travail salarié, parce qu’on doit payer ses factures, ou ne serait-ce que par plaisir, est perçu comme étant une peur de manquer et donc une marque de notre égo. Vouloir reprendre ses études en université pour mieux comprendre un concept, gagner en compétences est également vu comme une peur, ne pas suffisamment faire confiance en son intuition, c’est également un besoin de l’égo.
Grosso modo, toutes les actions que nous faisons, les pensées que nous avons, qui ne sont pas celles du new-âge et qui ne correspondent pas à son mode de fonctionnement, peuvent être vues comme étant une ruse de l’égo pour nous empêcher de nous éveiller, de grandir spirituellement.
Que dit la psychologie concernant cette notion d’égo ?
La notion d’égo en psychologie n’a pas trouvé de consensus tant cette notion englobe d’autres notions comme la personnalité ou l’identité. René Lecuyer distingue l’égo et le soi par ce à quoi ces notions se réfèrent. Pour Lecuyer, le soi correspond à la façon dont une personne se perçoit et les sentiments qu’elle a à son égard. Tout comme l’égo, le soi fait parti d’un ensemble qui régit un comportement orienté vers l’action. L’égo se réfère à tout ce que la personne fait pour garantir l’adaptation, la promotion, la défense de son soi. Au sein même de cette notion d’égo, Lecuyer y intègre la pensée, la mémoire, les processus cognitifs, les mécanismes de perceptions de la réalité, les mécanismes de défense, la sélection des stimuli et des réponses, etc. L’égo et le soi sont donc complémentaires dans la perception qu’à la personne d’elle-même et par les actions mises en place pour garantir le soi.
L’égo peut-être également vu comme le moi, qui permet à chacun de se percevoir comme un individu unique séparé du monde, unique et en même temps semblable. C’est la conscience que l’on a de soi-même en tant que personne, et de sa propre identité et personnalité. Le moi est ce qui permet à un enfant de se reconnaitre dans le miroir comme étant lui-même et de se percevoir comme un sujet distinct d’autrui. Face au moi individuel, se développe le moi par à rapport aux autres, le sentiment d’appartenance à un groupe (famille, amis, école, société…)
La construction identitaire, du soi, et la perception d’être un individu à part entière appartenant à un groupe sont autant d’élément à prendre en compte dans l’établissement de cet égo, qui est en réalité ce qu’est la personne dans son entièreté, avec toute son histoire, son mode de fonctionnement, sa perception, ses gouts, ses valeurs….
En clinique, la prise en compte de cet égo, de ce soi à toute son importance. On distingue trois manières d’être à travers l’égo: l’égoïsme, l’égocentrisme et le narcissisme.
L’egoïsme rejoint ce que nous avons vu plus haut, c’est le soi en tant que personne, le fait de se percevoir important, c’est le fait que nous puissions comprendre que nous avons besoin de nous occuper de nous-même avant de pouvoir nous occuper des autres. Etre égoïste, c’est savoir de quoi on a besoin, ce qui est important pour nous, prendre conscience de nos difficultés. C’est tout simplement avoir conscience de soi et être en mesure d’avoir un positionnement sain, pour s’occuper de soi. L’égoïsme nous permet d’accéder à une meilleure gestion de nos émotions, qui nous permet d’avoir un meilleur positionnement face aux autres. Un égoïsme faible peut engendrer des émotions inadaptées, un besoin de reconnaissance, de se placer en sauveur…
Le narcissisme renvoie à la façon dont on se juge, les mots que l’on emploie pour se percevoir, notre faculté à nous faire confiance. Quand un narcissisme est peu solide on va chercher des signes de reconnaissances de la part d’autrui et on peut donc avoir des comportements manipulatoires.
L’égocentrisme revoie au fait qu’on a besoin d’être au centre et que l’on se pense supérieur aux autres. Il peut se développer lorsqu’on a du mal à gérer certaines expériences et que l’on fait de soi sa priorité.
On voit bien ici que la notion d’égo est primordiale puisqu’elle renvoie à la façon que nous avons de nous percevoir et de nous considérer. L’égo est globalement la personne que nous sommes avec toutes nos nuances.
La notion d’égo par le new-age, quels impacts?
Nous voyons bien d’un point de vue psychologique que la notion d’égo renvoie à qui est la personne dans sa globalité : son vécu, sa personnalité, ses valeurs, son fonctionnement…
Le new-age quant à lui estime qu’est égo tous les mécanismes qui empêchent d’atteindre l’éveil spirituel, sans prendre en considération la construction de la personne et l’importance de celle-ci dans son équilibre psychique, la façon dont elle se perçoit, ce qui lui permet de s’identifier en tant qu’individu…
En psychologie, toute manifestation chez un individu à son importance et une raison d’être. On ne cherche pas à gommer, comme le souhaite le new-age, certaines parties de l’être. En partant de ce postulat, à vouloir se débarrasser d’une partie de soi, nous pouvons déséquilibrer notre psychique et impacter davantage certaines de nos structures comme notre estime de nous-même.
Les adeptes du new-age, en comprenant l’égo tel qu’il est énoncé dans ce mouvement, développent un comportement qui tend à analyser tous leurs comportements, leurs pensées pour déceler cet égo. Ils en viennent à questionner leurs émotions, leurs souhaits, leurs choix de vie. Certains en viennent à rejeter la personne qu’il était auparavant sous prétexte d’avoir été une personne influencée par son propre égo.
On en vient à développer une image instable de soi-même, un rejet, une forte culpabilité d’être soi-même. On ne choisit plus qui on est par rapport à soi, on choisit qui on est par rapport à ce qui conviendrait dans le mouvement new-age. On développe toute une vision de soi-même par rapport à un idéal énoncé par le new-age, pour atteindre cet éveil tend désiré.
L’adepte se retrouve face une tension permanente entre être simplement soi et être pour correspondre au new-age. Cette tension est déstabilisante et peut occasionner une perte de repère, une déconstruction de sa propre personne. On ne sait plus si on doit faire confiance en ses pensées, ses choix, puisque ceux-ci peuvent être l’œuvre de l’égo. Vers qui se tourner alors? Bien souvent l’adepte se tourne vers le mouvement new-age car lui seul est vu comme capable de déjouer l’égo et de permettre l’accès à l’éveil.
L’égo, n’est pas vu de la même façon dans le mouvement new-age et en psychologie. Ils ont cependant un point commun dans le fait de percevoir l’égo, le soi comme la somme des expériences, des conditionnement, de la personnalité et l’identité d’un individu. Cependant, alors que la psychologie perçoit toute manifestation personnelle comme utile à l’individu, le new-age tend à vouloir gommer les aspects qui empêchent l’individu de pratiquer sa croyance d’avoir à s’éveiller à son être divin, au risque de déstabiliser le fonctionnement psychique. La notion de soi est primordiale à acquérir et développer pour prendre place dans sa vie et dans la société. Sans celle-ci nous pouvons être à la merci de discours et comportements dérivants.
Ressources:
- https://journals.openedition.org/osp/1716
- https://www.cairn.info/le-concept-de-soi–9782130353461-page-15.htm
- https://www.cairn.info/psychologie-de-la-personnalite–9782804156824-page-51.htm
- https://www.cairn.info/l-identite–9782130589204-page-39.htm
- https://www.cairn.info/introduction-aux-theories-de-la-personnalite–9782100764877-page-13.htm
- https://www.cairn.info/identites–9782361063283-page-28.htm