« Dès que les recrues manifestent de l’intérêt, elles peuvent être bombardées d’amour par le recruteur ou d’autres membres de la secte. ….Le love bombing est un effort coordonné, généralement sous la direction des dirigeants, qui consiste pour les membres de longue date à inonder les recrues et les nouveaux membres de flatteries, de séduction verbale, d’attouchements affectueux mais généralement non sexuels, et de beaucoup d’attention à leurs moindres remarques. Le love bombing – ou l’offre d’une compagnie instantanée – est un stratagème trompeur qui est à l’origine de nombreuses campagnes de recrutement réussies ». (Margaret Singer)
La technique du “Love Bombing” (bombardement d’amour en anglais) est un processus de manipulation mentale mis en évidence par la psychiatre américaine Margaret Singer, pour décrire le fonctionnement de la secte Moon. Le love bombing consiste a démontrer une attention particulière et une intense affection envers une autre personne ou un groupe de personne. Ce love bombing peut être effectué par une seule personne envers un groupe, par un groupe envers un autre groupe, ou un groupe envers une seule personne.
Parmi les comportements du love bombing, on peut retrouver le fait d’avoir des marques d’affection excessives, comme ritualiser un câlin collectif envers un nouvel arrivant, lui prendre les mains, l’enlasser souvent, lui faire d’innombrables compliments sans le connaitre, lui sourire constamment … Tout peut faire penser à une marque de reconnaissance, de bienveillance, d’accueil… Tout est fait pour qu’on se sente accueilli et accepté dès la première minute.
Avec ces preuves d’amour, factices, il est facile d’arriver à baisser les armes, et lorsqu’on baisse les armes, on adhère plus facilement à un groupe, puis, petit à petit au mode de pensée et aux croyances. Vous le remarquez peut-être chez vous ou chez d’autres personnes, les mots doux font du bien, et on éprouve plus facilement de la sympathie envers la personne qui les dit. A l’inverse, on a tendance à repousser une personne qui a des mots et un comportement qui ne nous plaisent pas.
Dans les stages de développement personnel, de spiritualité, lors d’atelier ou de consultation indivuduelle, il est fréquent, de voir ces manifestations de love bombing, surtout lorsqu’on vient tout juste d’arriver. Les gens vous accueillent les bras ouverts, vous prennent dans leurs bras, vous disent que vous êtes une belle âme, vous font des cadeaux… Les cours de yoga, les stages de féminin sacré, de chamanisme, les salons ésotériques ( liste non exhaustive) et même les thérapeutes en cabinet, utilisent cette technique de love bombing, soit sans s’en rendre compte, soit pour attirer le futur client/adepte, soit les deux.
L’amour inconditionnel est pour le new-age, le maitre mot. Si on se dit être éveillé, on se doit de montrer aux autres que l’on est tout amour, et cela passe par certaines démonstrations de love bombing . Les adeptes le font envers les autres adeptes dans un souhait, inconscient, d’être accepté par le groupe et ne pas être rejeté. On accepte ce type de démonstration, parce que cela fait du bien de se sentir accueilli et accepté. On l’accepte d’autant plus si on manque de confiance en soi, que l’on ne s’aime pas… Les autres comblent inconsciemment l’amour que l’on n’arrive pas à se donner.
“Tu es exceptionnel”, “ tu ferais un excellent thérapeute”, “je vois en toi une belle âme”, “c’est sûre, tu es médium”, “Notre lien d’âme est tellement fort”, “ tu as de si belles énergies”… Des mots qu’on entend dans pratiquement tous les rassemblements new-age, dès la première rencontre. Par ces démonstrations, on peut se dire que l’on a trouvé des personnes qui nous comprennent. Bien souvent dans tout cela, il n’y a rien d’authentique, les personnes répondent aux codes et conditionnement du new-age. Quand on devient adepte, on utilise ce love bombing bien malgré soi, car il est devenu un langage, un rituel entre les adeptes. Ne pas le faire, c’est risquer de recevoir les critiques bien connues du new-age: “ tu es dans l’égo”, “tu n’as pas le coeur assez ouvert”, “ tu as peur” etc…
Ce love bombing ne se déroule pas uniquement les premières fois qu’on intègre un groupe de développement personnel ou new-age, il est voué à être repeté encore et encore, pour que nous continuions à baisser les armes et avoir davantage confiance au groupe. Lorsqu’on a confiance en une personne ou en un groupe, il est difficile de remettre en question ce qui est dit et ce qui est pratiqué. Notre esprit critique, bien souvent, se volatilise.
La technique du love bombing est également faite pour empêcher du mieux possible qu’un adepte doute, pose des questions, quitte le groupe, une croyance. Des liens se tissent à travers ce love bombing, et bien souvent on devient demandeur encore et encore de cette bienveillance. Elle fait tellement de bien. Ce lien retient, et quand on commence à douter, cela est difficile de partir car on est tiraillé entre rester dans cette fausse bienveillance et partir vers des horizons plus sains.
Par ce texte, je ne dis pas qu’il faille rejeter toute marque d’affection et le voir comme une tentative de manipulation, partout, tout le temps… Certains le font naturellement, sans chercher à attirer l’autre. Un simple sourire, de la gentillesse, n’est pas forcément de la manipulation. Ce qui doit alerter, est lorsqu’on trouve que ces marques d’affection sont de trop: on vous connait à peine, mains on vous prend dans les bras, on vous fait des louanges, on vous offre des cadeaux… Dans une relation ( amicale, professionnelle, amoureuse…) ces marques d’affection ne se font pas tout de suite, mais une fois qu’un lien s’est créé.
Il est également important de bien se connaitre et notamment repérer lorsqu’on a besoin d’avoir de l’affection. Car plus nous sommes en demande et plus nous pouvons tomber sous le charme de démonstration malsaine. En règle générale lorsque nous sommes en demande, nous nous ouvrons davantage vers les marques d’affection et nous sommes moins en garde. Le point d’attention est de savoir lorsque cette demande peut nous faire avoir trop besoin de l’autre.