Témoignage: New-age et troubles psy

Le témoignage ci-après a été publié par Partiellement Moi sur son compte Instagram. Elle m’a gentiment autorisée à le publier sur mon site.

« J’ai l’impression de voir fréquemment des critiques du New Age sur les réseaux sociaux, mais rarement par des personnes qui ont côtoyé ce milieu de près. Voici mon témoignage, en tant que personne ayant un trouble psy.

Wikipedia définit le New Age comme  » un courant spirituel occidental des xxe siècle et xxie siècle, caractérisé par une approche individuelle et éclectique de la spiritualité. »
C’est un mouvement qui valorise le travail sur soi et l’éveil, en se basant sur des pseudos-sciences et des croyances issues de diverses religions.

En France, de nombreux thérapeutes (ce titre n’étant pas protégé) basent leur pratique sur la pensée New Age et proposent d’accompagner des personnes en détresse sans avoir de formation reconnue par l’état.

Ma mère, atteinte d’un trouble psy grave, est une grande adepte du New Age. J’ai donc grandi dans ce milieu, et j’ai pu constater de nombreuses dérives. 

Je comprends cependant ce qui pousse des personnes porteuses de troubles psy à se tourner vers ces formes de thérapie. Le système psychiatrique est encore imprégné d’énormément de violences, ce qui repousse beaucoup d’entre nous. Cependant, des scandales éclatent fréquemment et nous rappellent que les praticiens New Age, en plus de ne se baser sur aucune preuve scientifique, se rendent aussi coupables de maltraitances et donnent souvent des conseils dangereux.
Voici ce qui m’a poussé à quitter ce milieu en tant que personne malade psy.

Le New Age m’a fait croire que j’étais responsable de tous ce qui arrivait dans ma vie.

Dans le New Age, l’idée que l’on peut modifier sa réalité grâce à la prière, la méditation ou la pensée revient souvent. Cela induit que l’individu porte la responsabilité de tout ce qu’il vit, puisqu’il n’a qu’à envoyer du positif à l’univers pour que de belles choses lui arrivent.

J’ai déjà entendu « si tu veux arrêter de te faire harceler à l’école tu n’as que te lever plus tôt pour méditer tous les matins », « si elle a eu un cancer c’est parce qu’elle n’avait pas réglé un conflit interne », « si tu as besoin d’argent tu n’as qu’à écrire un chèque à l’univers pour lui demander de t’envoyer la somme exacte », etc. 

Cela vient nier l’impacte des oppressions systémiques sur nos vies, mais aussi du hasard. A cause de mes troubles psy et de mes traumas, j’ai souvent tendance à croire que tout est de ma faute et que je mérite tous ce qui m’arrive de négatif. Le New Age a donc nourri mes angoisses, ma culpabilité et ma haine de moi même.

Le New Age a nourri mes pensées irrationnelles envahissantes.

Bien que je ne sois pas psychotique, mes troubles psy provoquent un décalage avec la réalité qui cause parfois des pensées irrationnelles. Évoluer dans le milieu New Age a accentué ce phénomène, car de nombreuses personnes parlent de leurs croyances spirituelles comme des vérités prouvées par la science. Beaucoup d’idées irrationnelles sont considérées comme des faits, et c’était donc difficile pour moi de me rendre compte que ce que mon cerveau me faisait croire n’était pas normal.

Depuis petite j’ai une peur panique de l’obscurité jusqu’à avoir parfois l’impression que quelqu’un rentre dans ma chambre. Rien à voir avec des traumas bien sûr, je suis juste sensible aux énergies (ironie). J’ai souffert d’anorexie et je souhaitais arrêter complètement de manger. Ça n’a rien de dangereux, puisqu’il est possible de nourrir son corps simplement de lumière divine, croire qu’on a besoin de nourriture est une faiblesse de l’esprit (ironie).

J’ai dû faire d’énormes efforts pour apprendre à faire la différence entre le rationnelle et l’irrationnel, puisque j’ai grandi entourée d’adultes qui en étaient souvent incapables.

Dans le milieu New Age, j’ai plusieurs fois entendu des conseils de santé mentale ou physique sans aucun fondement scientifique et aux conséquences potentiellement dangereuses. On m’a dit que les vaccins était dangereux, que je pouvais coucher sans protection et compter sur le fait que je n’avais pas de conflit interne pour ne pas contracter de MST…

Le pire conseil qu’on m’ait donné en santé mentale a sûrement été de prendre de l’ayahuasca (un des plus puissants hallucinogènes) pour affronter mes traumas et me débarrasser de mes symptômes. J’étais une ado extrêmement instable à l’époque et ça aurait pu avoir des conséquences catastrophiques. Heureusement j’ai refusé, malgré l’insistance de ma mère pendant plusieurs années.

Si vous trouvez votre bonheur dans le New Age, je ne suis personne pour vous dire de quitter ce milieu. Je suis convaincue que ce mouvement a aidé ma mère à un niveau, même si il a pu parfois la mettre en danger.

J’invite cependant à la prudence, confier votre santé à des personnes qui ne se basent pas sur la science, c’est très risqué. Vous pouvez combler votre besoin de spiritualité tout en gardant du recul, en continuant par exemple de vous informer via des sources fiables et objectives. 

Si vous évoluez dans le milieu New Age, n’oubliez pas de rester vigilant.e à l’impact que cela a sur votre santé mentale. Protégez vous, et faites attention aux dérives sectaires qui ne sont jamais bien loin. »